Marjorie Paillon, et les élections américaines

Marjorie Paillon, journaliste sur BFM TV, a animé depuis la rentrée, les divers rendez-vous spéciaux sur les élections présidentielles américaines « USA 2008 ». Cela fait deux semaines qu’elle sillonne les Etats-Unis et nous livre ses reportages avant la soirée spéciale de BFM TV du 4 au 5 novembre. Soirée électorale, pour laquelle Marjorie participera aux 30h de directs de la chaine, depuis le QG républicain, à Phœnix en Arizona. Nous avons rencontré Marjorie et fait le point sur ces élections aux répercussions mondiales.

Marjorie, pour faire connaissance, veuillez vous présenter à nous s’il vous plait.

J’ai 28 ans et un parcours plutôt « patchwork » en matière de journalisme. Je n’ai pas fait d’école en France, mais à l’étranger : l’Ihecs à Bruxelles, American University à Washington, D.C.

J’ai suivi un cursus en sciences politiques à Sciences Po Lyon et en administration de la production audiovisuelle à la Sorbonne. Parce qu’on apprend plus sur le terrain que nulle part ailleurs, mes études ont toujours été jalonnées de stages et postes en freelance : NBC et MSNBC à Washington, bureau américain de la 1ère chaine anglophone canadienne CTV , documentaires et magazines d’info pour plusieurs maisons de production parisiennes…etc.

Qu’est-ce qui vous a poussée à devenir journaliste ?

Certainement l’envie de mettre en perspective ceux et celles qui font l’actualité.

Marjorie, aviez-vous déjà une certaine attirance pour les Etats-Unis avant que ce pays anime votre carrière ? Votre intérêt pour la politique américaine viendrait de vos expériences chez NBC et CTV, quelles étaient vos activités sur ces médias ?

J’ai toujours eu un vif intérêt pour la politique et l’actualité américaine. J’ai effectué mes études aux Etats-Unis l’année du déclenchement de la guerre contre l’Irak, en 2003. J’ai été plongée dans le bain de l’info la nuit même où la première bombe est tombée sur Bagdad. Un sacré baptême du feu puisque je démarrais alors comme Producer / reporter au bureau de CTV à Washington. Travailler avec une équipe canadienne était assez rafraîchissant : on a en même temps le côté « scoop » des médias américains et une bonne dose d’esprit critique européen ! Côté NBC / MSNBC, j’ai intégré l’équipe de Chris Matthews pour le lancement de son talk show politique du week-end, « The Chris Matthews Show « . J’ai beaucoup appris au contact de ces grands professionnels de l’information, en passant par tous les postes de la chaine.

La politique américaine, entre autre, vous la suivez pour BFM (TV et Radio). On arrive dans la dernière ligne droite des présidentielles US. Quel va être votre rôle dans le dispositif spécial de BFM TV d’ici le 4 novembre ?

Depuis la rentrée du mois d’août, j’ai présenté le feuilleton de l’élection présidentielle américaine au côté de plusieurs journalistes de BFMTV : à 13h avec Ruth Elkrief , à 18 h 20 et 20 h 20 avec Thomas Sotto , et bien sûr, à 22 h 45 avec Karl Zéro et Thierry Arnaud pour le journal de campagne du jour.

Je sillonne depuis plus de 15 jours les Etats du sud et de l’ouest pour une série de directs et de reportages originaux pour donner un nouveau regard sur cette campagne. J’ai ainsi parcouru le Texas pour savoir comment les texans jugent l’héritage de George W. Bush, le Colorado pour prendre la température dans un nouveau Swing States (un des Etats qui est sur le point de basculer du Parti républicain au Parti démocrate). Je suis à présent à Phoenix en Arizona dans le fief de John McCain, où je serai en direct pour l’édition spéciale de BFMTV les 4 et 5 novembre. 30 heures de direct qu’il va falloir alimenter en analyses, réactions et confidences !

Ces élections vous occupent aussi sur le net, puisque vous êtes la co-fondatrice de ilovepolitics (site créé en juin 2007). Quel est le concept de ce blog et vos objectifs ?

Ilovepolitics.info est le blog de la campagne présidentielle américaine vue de France. C’est un formidable projet qui n’aurait jamais pu voir le jour sans le travail précieux d’éditeur de Julien Landfried d’Actu Point Info. L’idée est de proposer une couverture la plus riche possible à nos lecteurs : buzz, vidéos du moment, analyses politiques, briefing de l’IRIS , archives de l’INA, fiches de lectures des ouvrages clés pour décoder cette élection.

Le blog est bien sur ouvert aux commentaires, ce qui occasionne des débats parfois vifs entre internautes.
Nous sommes repris par les grands sites d’info comme Yahoo ! Actualité ou Yahoo News.

Le travail de veille de Julien nous permet d’être les premiers à mettre en ligne les vidéos et clips qui font buzzer la toile américaine.

Quel y sera le programme pour le 4 novembre ?

Ilovepolitics.info animera aussi la nuit de l’élection du mardi 4 novembre de 20h00 à 6h00 avec des débats, la diffusion de documentaires, avant une grande soirée de liveblogging depuis les locaux de la Netscouade .
Vous pouvez retrouver toutes les informations sur cette soirée spéciale élection sur le groupe Facebook d’Ilovepolitics .

Durant l’été vous avez parcouru les Etats-Unis pour enquêter sur John McCain et aller à la rencontre des américains. Ce périple vous a valu d’écrire un livre « John McCain, le survivant  » paru aux éditions Alphée.

Avant d’entrer en matière, comment s’est déroulée votre enquête ?

Il s’agissait d’une véritable enquête de terrain ! Les médias étrangers sont le parent pauvre du journalisme aux Etats-Unis. Les équipes de campagne ne vous accueillent pas les bras ouverts. Pour une raison toute simple : vous n’apportez aucune voix à leurs candidats. Pire même, vous pouvez être celui qui va relayer une de leur gaffe et lancer des polémiques. Il faut donc savoir ruser, prendre son mal en patience et trouver des solutions de contournements. J’ai donc pris le parti de donner la parole aux éditorialistes, experts qui ont suivi le parcours politique de John McCain et qui l’ont conseillé. Mais aussi aux américains qui devront faire un choix le 4 novembre. J’ai sillonné les Etats-Unis pour recueillir leur témoignage et proposer des clés de lecture pour comprendre le personnage et le programme politique de John McCain, tout en recentrant les sujets qui seront déterminants dans le choix des électeurs américains.

Quand pratiquement tout le monde succombe à une Obamania, vous avez choisi d’aller à contre-courant. Pourquoi ce choix ? Nous rappeler que ce sont les américains qui votent… et ont élu (2 fois) Georges W. Bush ?

Aucun livre n’avait jamais été écrit en français sur John McCain, même lors de son ascension en 2000 face à George W. Bush. Et qu’aucun ouvrage n’était en préparation non plus cette année. L’idée pour moi était surtout de pouvoir analyser l’état du Parti républicain après 8 ans de mandats de George W. Bush sous le prisme de la candidature de John McCain. Donner des clés aux lecteurs francophones pour comprendre le candidat républicain et son histoire tout à fait hors des sentiers politiques battus. Mon éditeur m’avait tout d’abord proposé d’écrire sur Barack Obama, mais je ne voyais pas réellement comment analyser un candidat dont le parcours fulgurant n’en disait pas encore assez long sur ses actes politiques. Et je ne voulais pas sortir le xème ouvrage sur Obama sans pouvoir donner des informations nouvelles ou un angle différent par rapport aux très nombreux livres déjà parus sur le candidat démocrate.

On dit les américains peu intéressés par les élections généralement.. Y a-t il du changement de ce côté-là cette fois-ci, voir un engouement tel qu’en France en 2007 ? La crise actuelle pourrait-elle servir une plus forte participation?

Généralement, le premier vainqueur des élections présidentielles aux Etats-Unis, c’est le taux d’abstention. Cette année, les candidats, Barack Obama tout particulièrement, a fait le forcing pour inciter les citoyens américains à aller s’enregistrer sur les listes électorales et aller voter. C’est notamment grâce à ces électeurs venus très nombreux voter ce printemps qu’Obama a remporté la nomination du Parti démocrate. Il existe aussi un système de votes anticipés aux Etats-Unis, en vigueur dans 31 Etats. Lors de la dernière élection présidentielle, on estime qu’1/3 des électeurs américains ont utilisé ce dispositif pour voter avant le jour J. Les premiers chiffres de cette édition 2008 indiquent que ce ratio pourrait être dépassé. Cela veut donc dire que de très nombreux américains se seront prononcés avant le 4 novembre. Le jour de l’élection est donc devenu plus une deadline qu’un véritable événement. Les américains s’intéressent à cette campagne comme jamais. Qu’ils votent Obama ou McCain, ils sentent qu’ils vont devoir opérer un véritable choix de société pour les années à venir. Et la crise financière les en a fait encore plus prendre conscience.

A quelques jours du grand événement, dans sont vos dernières impressions et analyses ?

Je pense que cette élection va être plus serrée que l’on ne veut bien le dire. Les sondages opérés au jour le jour restent nettement favorables à Barack Obama, mais c’est sans compter le fameux « effet Bradley » : les gens interrogés peuvent déclarer ouvertement voter pour Obama, mais changer d’avis une fois seuls dans l’isoloir. Quelque soit le nom du futur président, celui-ci n’aura pas les moyens financiers de mettre sa politique en application. Les caisses de l’administration américaine sont vides. D’autre part, il restera un président américain, c’est à dire tourné vers les intérêts de son pays. Je pense par ailleurs que des contestations partielles des scrutins peuvent avoir lieux. De nouveaux Etats sont sur la liste des fameux « Swing States » : le Colorado, le Nevada, le Missouri, la Virginie… Les équipes de campagnes auront donc la volonté de conserver ces Etats par quelques moyens que ce soit si les scores sont très serrés.

Merci beaucoup Marjorie pour cette interview en direct des States !

 

Par Damien D.

 

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