Virginie Plaut : « J’ai une vision citoyenne de mon métier »

Virginie Plaut, ambiance fin de tournage avec Emmanuel, demandeur d'asile soudanais, et le chef opérateur, Cyrille Rénaux
Virginie Plaut, ambiance fin de tournage avec Emmanuel, demandeur d’asile soudanais, et le chef opérateur, Cyrille Rénaux

Virginie Plaut, ex-journaliste de BFMTV, se passionne pour la réalisation de documentaires et les joies du terrain depuis son départ de la chaine info en juillet 2010. Samedi 21 octobre, l’un de ces films, « Rencontres au paradis » sera diffusé à 21h30 sur Public Sénat. Elle y conte l’histoire de migrants irakiens, syriens ou soudanais, qui ont réussi leur intégration en Allemagne. Elle partage avec nous les coulisses de ce film.

Si les téléspectateurs de BFMTV se souviennent de vous lors des premières saisons de « Première Édition », quelles ont été vos activités depuis votre départ voilà sept ans ?

Je suis restée dans la télé mais j’avais envie de faire du terrain, de sortir un peu de mon studio… Alors je me suis lancée dans la réalisation de magazines et documentaires long format.

Pourquoi vous être orientée vers ce genre, le documentaire ?

J’ai une vision « citoyenne » de mon métier… Pour moi, un journaliste ou un réalisateur a le devoir d’informer le public, de lui donner toutes les cartes en main pour exercer son devoir de citoyen comme il le souhaite, mais en toute connaissance de cause. Le documentaire nous permet de nous poser, de rentrer dans les détails, de faire connaissance avec les protagonistes… Et parfois de changer d’opinion. Souvent le rejet ou la peur viennent quand on évoque des généralités, des groupes impersonnels… Et puis, quand on fait connaissance, qu’on évoque des situations précises, la peur disparaît et vient la curiosité ou la compassion ! Avec un documentaire, on peut parfois changer le regard d’une ou deux personnes !

Quels types de documentaires avez-vous tourné dernièrement ?

Je viens de terminer un 45 minutes sur « le parcours du combattant des demandeurs d’asile » pour C8. J’ai aussi réalisé un documentaire sur « l’excellence française en danse » pour France 2, entre autres.

« Avec un documentaire, on peut parfois changer le regard d’une ou deux personnes ! »

Et tout ça en tant que freelance ?

Oui ! Souvent on ne sait pas ce qu’on fera ni avec qui dans 3 mois ! Mais ça permet de travailler avec plein de gens différents, sur des sujets et des thèmes variés… Ça correspond à mon caractère, moi qui ai toujours la bougeotte !!

L’un de vos documentaire, « Rencontres au paradis », va être diffusé samedi 21 octobre sur Public Sénat. De quoi est-il question ?

C’est l’exemple d’une intégration réussie de migrants irakiens, syriens et soudanais en Allemagne, à Detmold, en Rhénanie du Nord. Une intégration réussie à la fois grâce à tout ce que l’Allemagne met en œuvre pour ses réfugiés et grâce à un projet théâtral mené par la troupe « Théâtre Fragile » de Marianne Cornil et Luzie Ackers.

Virginie Plaut entourée de la famille Mansour (irakiens arrivés en Allemagne en 2015) et Anna, la traductrice
Virginie Plaut entourée de la famille Mansour (irakiens arrivés en Allemagne en 2015) et Anna, la traductrice

Qu’est-ce qui vous a incité à vous intéresser aux migrants et à traiter votre sujet sous cet angle ?

Vous l’avez compris, la thématique des réfugiés et demandeurs d’asile est très importante pour moi, depuis longtemps.
Pour moi, le droit d’asile est l’ultime droit, le seul qui nous reste quand on nous a volé tous les autres (droits, la liberté, la sécurité, la propriété… Et quand je vois comme on considère ces femmes et ces hommes qui ont réussi à survivre à toutes ces épreuves. Je ne comprends pas.

« J’espère que s’il nous arrive un jour de tels drames, nous pourrons trouver un pays qui nous ouvrira ses frontières »

Or sur ce thème, on ne voit souvent que des reportages ou documentaires sur les horreurs que ces gens fuient, sur l’enfer de l’exil, leur trajet ou les conditions terribles de l’arrivée. Et c’est important que ces films existent ! Mais je voulais montrer qu’il était possible que l’intégration se passe bien. Que si l’État d’accueil se donnait les moyens de faire les choses correctement, l’arrivée de ces réfugiés pouvait être une chance.

Quelles ont été vos conditions de travail pour ce documentaire ?

Ça demande beaucoup d’enquête, de calage… J’ai commencé à travailler en janvier. J’ai fait connaissance avec tous les protagonistes. Nous avons tourné au total 10 jours sur place, jusqu’à la représentation théâtrale début juin. Puis montage pendant 3 semaines. Pour 30 minutes de film. Le film est produit par Wild Angle production, les images sont de Cyrille Rénaux, le montage de Mathieu Goasguen.

Depuis, nous sommes toujours en contact avec nos  « persos ». Le documentaire permet de créer des liens très forts.

La question des migrants n’est plus vraiment au cœur de l’actualité. Le temps court de l’actu n’est-il pas frustrant face au temps long que nécessite un docu ?

En fait, cette question est toujours d’actualité. Des personnes meurent tous les jours en mer pour avoir tenté de faire le trajet ! En ce qui me concerne, je souffrais vraiment du temps court de l’info continue ! C’est tellement frustrant de passer d’un sujet à l’autre sans avoir le temps de s’arrêter, d’approfondir… J’avais l’impression de passer à côté de tellement de choses. Dans le long format, on a le temps de se poser un peu, de réfléchir à ce qui a vraiment du sens, de faire vraiment connaissance avec les gens que l’on filme. C’est tellement enrichissant humainement et intellectuellement !

Quels sont vos prochains projets de reportages ?

L’Indonésie pour Arte puis Haïti, à nouveau pour Public Sénat.

« Rencontres au paradis » à suivre à partir de 21h30 samedi 21 octobre sur Public Sénat.

Merci beaucoup Virginie !

par Damien D.